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DES JARDINS ET DES SOURCES .
Avancer est une obligation , le devoir de se sentir vivant et pourtant il arrive que cela ne soit plus possible mais avant que le printemps ne s'installe elle a avancé, elle a choisi de ne renoncer à rien , d'accepter les bras tendus comme les portes ouvertes bien déterminée alors à ne plus trouver porte close .
Ainsi un beau matin du mois de mars aprés le départ des enfants pour l'école et le lycée , aprés avoir bu une dernière tasse de thé elle s'est mise en route .
Il y avait plusieurs chemins et elle en a choisi un et un seul pour se rendre à ce rendez vous essentiel . Ce fût celui de son passé , elle a roulé doucement en arrivant dans le village où durant plus de 20 ans elle a cru bâtir sa vie en dur , elle s'est accordée une simple pause devant le portail de l'école où ses enfants ont appris l'alphabet et la géométrie , elle s'est attardée devant la boulangerie inchangée depuis des années juste pour humer la bonne odeur du pain sortant du four , elle a juste évité de passer devant leur maison d'autrefois . On ne flirte pas avec le chagrin , ce serait trop malsain .
Puis elle a traversé les champs à perte de vue ouvrant les fenêtres en grand pour y faire entrer le souffle de vie des terres ensemencées .
Le village au loin se dessinait et elle a pensé combien avoir un entretien dans un tel lieu était une chance . Elle a garé sa voiture , en est descendue aprés avoir troquer ses vieilles Converses pour des ballerines plus adaptées et a cloché ( oui elle revendique ce mot : je cloche , tu cloches , il cloche ...Quoiqu'il cloche ...Bon elle verra cela plus tard ) .
L'immense portail s'est ouvert et elle est allée se présenter sous l'escalier ( copie de celui du château de Fontainebleau ) . Un monsieur trés souriant l'a accompagnée dans dans une pièce et lui a offert un café pour la faire patienter . Assise prés d'une table elle a observé autour d'elle et respiré l'air ambiant , ce parfum unique des vieilles demeures , savant mélange d'odeurs familières , celle du cuir , celle des chiens mouillés , celle du chocolat chaud et du café , celle des vieux Barbour bien râpés , celle des buis et de l'herbe humide .
Elle a entendu les pas de celle avec qui elle avait rendez vous , trotter dans l'escalier et à peine eût t'elle le temps de se lever qu'elle échangea un salut amical avec son hôte d'une main ferme et directe .
Celle ci lui proposa de nouveau une boisson chaude et elle accepta , ainsi une fois les deux tasses fumantes apportées l'entretien put commencer ...
Tout se passa trés vite , enfin si bien qu'elle en sortit une heure et demi plus tard persuadée qu'elle n'était restée qu'un quart d'heure à peine . Les mots furent simples et l'échange trés amical , elle se sentait bien , là dans cette maison vivante , dont les murs mêmes semblaient lui dire :" tout va bien , ici tu ne risques rien !!!! " .
Aussi il n'y eût pas de surprise quand la femme la rappela pour lui confirmer que sa candidature était retenue . Il lui faudrait juste apprendre cinq siècles de l'histoire des jardins , d'architecture et ce qui semblait insurmontable se fit avec une facilité déconcertante . Que de fous rire partagés avec petite chérie et petit chou engagés comme répétiteurs à ses côtés .
Ils ne lui passaient aucune erreur et comme sa mémoire est avant tout visuelle elle s'est imaginée dans la salle des marbres alors qu'elle se trouvait dans leur salon chambre ...Il y eût beaucoup de rires quand elle décrivait le ployant LouisXIV en désignant le marche pied de marque suédoise . Il lui fallut une grande imagination pour présenter les vases en porphyres , les torchères , le lit de repos du marquis de Marignan frère de madame de Pompadour , les tapisseries en Savonnerie et le médaillon au dessus de la cheminée ...Un trophée de 4 bois devint alors celui ramené d'une chasse de Tanzanie , le parquet se fit en point de Hongrie et la table de la cuisine venue de Suède se fit italienne ...
Les jardins lui donnèrent plus de difficultés tant ceux-ci sont variés et riches de cinq cents années de remaniements divers ; quel bonheur aussi de voir le jardin japonais , endroit divin de repos , de sérénité et de grâce . Il lui a fallu maitriser l'art de la science des siècles passés , parler de la maitrise subtile de la science des niveaux de l'eau , comprendre un passé incroyablement vivant .
Sa première journée dans la peau de guide (en intermittence ) allait se faire avec les plus expérimentés et en moins de cinq visites plus aucun recoin des sept pièces n'avait de secret pour elle . Elle a terminé cette belle journée avec une tasse de thé à "La foulerie" avec celles et ceux qui deviendraient au fil du temps des compagnons nouveaux . 
Ainsi une autre page s'est ouverte pour elle sur un des plus beaux jardins de France ...Pour quelques heures mais le temps là bas n'a plus la moindre importance puisqu'il s'agit d'amour entre elle et ce lieu , entre les tapis d'herbe verte et les cariatides de la cheminée , entre les jeux de miroirs et la magie de la nature apprivoisée avec consentement .
Ah mais elle a oublié l'essentiel ....
Courrez vous aussi à Courances ; elle y sera en mai ....
Anne Chiffon
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