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Si Versailles m'était conté ...
S'envoler dans la douceur de sa mémoire et faire d'une journée , un pélerinage joyeux comme une flaque d'eau dans laquelle un enfant sauterait à pieds joints .
Partir vers ses souvenirs libre comme un oiseau qui déploie ses ailes et goûter avec délice à la saveur esquise de ce qu'elle a laissé derrière elle .
Avant de poser leurs bagages avec leurs deux ainées ils avaient transité un peu plus de deux ans dans cette ville royale où elle aimait se promener, rassurée par l'Histoire omniprésente des vieux murs qui avaient gardé entre leurs pierres des coeurs d'hommes et de femmes , d'enfants et d'oiseaux ; pour l'éternité .
Elle descendait trois fois par semaine avec grande chérie et mrs chérie les quatre étages de l'escalier étroit pour aller au marché . Elles quittaient ensemble le nid douillet qu'elle avait trouvé , au dernier étage d'un trés vieil immeuble où devaient vivre les domestiques de l'immense palais au bout de l'avenue .
Chaque aprés midi elle emmenait ses fillettes jouer autour du " Bassin de Neptune " et goûter aux joies des promenades dans les allées sous les arbres aussi vieux que les murs d'enceinte .
Ce petit bijou d'appartement était dans un écrin qu'une dame âgée , grand mère d'une de ses amies avait habité et décoré avec raffinement . Avait t'elle voulu réparer son histoire à deux pas des hôtels princiers ? Cette délicieuse femme était , la femme de Pierre Frey et elle avait offert aux murs de ce qui fût notre premier nid des tissus délicats ; des Chintz rayés aux couleurs subtiles entouraient les fenêtres et en nous remettant les clés , c'était pour elle comme une transmission . Pas de hauts plafonds , bien au contraire mais un cocon de douceur trés bas . Trois jolies pièces sans moulure , sans stuc et une minuscule cuisine aux tomettes d'origine sur le sol déformé par les siècles .
Les filles ne s'en souviennent pas mais Anne Chiffon n'a jamais oublié ce bijou simple et divin . Elle est retournée le voir de loin , en soulevant son regard vers le quatrième étage .
Elle a fait un détour aussi vers cette boutique tenue par des soeurs où elle a toujours acheté les images pour les communions , les baptêmes de ses enfants . Puis elle est entrée dans l'église , pure merveille que St Louis . Sa paroisse était celle alors de Notre Dame et elle est entrée sur la pointe des pieds pour la première fois aprés avoir traversé la place de la cathédrale pavée désormais et entourée d'immenses palmiers ( ou cocotiers ?).
( A la protection de Marie est fermée jusqu'au 18 août ce qui explique les vitrines recouvertes de peinture blanche ) .
Puis elle a repris le chemin , celui de la reine , rien de moins .
LA , elle ne dit plus rien , elle avance , admire ... Quelle splendeur ! On la voit , on la sent là toute proche et elle ne peut s'empêcher de penser à cette lettre écrite de sa main où elle faisait appel aux coeurs des mères ...
L'émotion est grande , les jardins frais et son petit palais , petit , exquis ... Elle vous laisse savourer ces images d'un lieu chargé d'Histoire , chargé par la présence d'une mère qui a voulu s'écarter avec ses enfants d' un palais aux plafonds si hauts qu'on n'en voyait pas les esquisses à la nuit tombée . Içi chez Marie Antoinette c'est de vie et de liberté qu'elle s'est sentie entourée . Délicatesse totale et enivrante .
Elle a marché le long des rosiers vers la ferme , la laiterie .
L'herbe venait d'être fauchée et ...au loin le temple à l'amour , le "Belvédère" , la rivière qui coule au milieu des roseaux ...Et l'orangerie dont elle est tombée amoureuse .
Si Versailles m'était conté ...
Anne Chiffon
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